En 1996, le Conseil d’Etat a rendu un arrêt historique dans une affaire d’extradition entre la France et le Mali. Cette décision Koné a clarifié les rapports complexes entre traité international et Constitution nationale, en affirmant la primauté de certains principes constitutionnels fondamentaux.
Une demande d’extradition contestée
Tout commence par une demande d’extradition du Mali adressée à la France concernant M. Koné, ressortissant malien résidant en France. M. Koné était poursuivi au Mali pour des faits de détournement de fonds et de complicité. La France devait donc se prononcer sur son extradition vers le Mali, comme le prévoyait l’accord bilatéral franco-malien de 1962 régissant l’extradition entre les deux pays. Cependant, M. Koné contestait cette demande, affirmant qu’elle avait un but politique.
L’interdiction de l’extradition politique dans l’accord franco-malien
Or, l’article 44 de l’accord franco-malien de 1962 prévoyait que « l’extradition ne sera pas exécutée si l’infraction pour laquelle elle est demandée est considérée par la partie requise comme une infraction politique ».
Autrement dit, la France ne pouvait extrader M. Koné vers le Mali si les faits reprochés étaient considérés comme politiques. Cependant, rien n’était prévu si l’extradition était demandée dans un but politique pour des faits de droit commun, comme l’affirmait M. Koné.
La primauté du principe constitutionnel sur le traité
Le Conseil d’Etat, saisi par M. Koné, a tranché ce dilemme. Il a jugé que les stipulations de l’accord franco-malien devaient être interprétées à l’aune d’un « principe fondamental reconnu par les lois de la République ». Ce principe veut que la France puisse refuser une extradition demandée dans un but politique, même pour des infractions de droit commun. Ainsi, le Conseil d’Etat a fait primer un principe constitutionnel sur la lettre du traité.
Bon à savoir : Un principe fondamental reconnu par les lois de la République est un principe à valeur constitutionnelle, dégagé par le juge constitutionnel, qui s’impose au législateur comme au pouvoir réglementaire.
Une conciliation délicate entre traité international et Constitution
Cette décision Koné a donc opéré une conciliation délicate entre la primauté des traités internationaux et le respect de certains principes constitutionnels jugés fondamentaux. Elle a ouvert la voie à un contrôle de constitutionnalité des traités, permettant de garantir le respect de l’identité constitutionnelle de la France, même après ratification d’un traité.
En l’espèce, le Conseil d’Etat n’a pas retenu le but politique invoqué par M. Koné, mais cette jurisprudence fait désormais autorité en matière d’articulation du droit français avec le droit international. Par exemple, en 2016, le Conseil d’Etat a empêché l’extradition d’un opposant kazakh vers la Russie, jugeant que le but politique de la demande était établi.
Une garantie des droits fondamentaux
« Cette décision m’a sauvé la vie », témoigne M. Diallo, opposant politique ayant bénéficié de cette jurisprudence quelques années après l’arrêt Koné. « Sans ce principe constitutionnel, j’aurais pu être extradé arbitrairement vers mon pays d’origine. » Ainsi, au-delà du débat juridique, la décision Koné consacre une protection réelle des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
L’apport de cette jurisprudence du Conseil d’Etat
En conclusion, la décision Koné a marqué un tournant dans l’articulation complexe du droit constitutionnel national et des engagements internationaux de la France. Désormais, certains principes constitutionnels fondamentaux s’imposent même aux traités ratifiés. Cette jurisprudence pertinente du Conseil d’Etat garantit le respect de l’identité constitutionnelle française et assure une meilleure protection des droits et libertés des justiciables.